Cancers secondaires du poumon

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(Last Updated On: 31 août 2018)

I- Généralités :

C’est une pathologie fréquente, revêtant des tableaux radio-clinique d’une grande disparité, d’un pronostic très sévère avec des possibilités thérapeutiques limités.

Tous les cancers peuvent métastaser dans les poumons par ordre de fréquence décroissant cancers de la sphère ORL, du sein, du rein, du colon et du rectum…

II- Épidémiologie :

Les principales tumeurs associées à des métastases pulmonaires sont les suivantes :

Sein 19%
Appareil digestif 17%
Rein-vessie 10%
Génital 10%
Sarcomes 9%
Poumons 6%
Orl 4%
Thyroïde 3%
Prostate 2%
Autres 6%
Indéterminées 15%

Tableau 1 – Origine des métastases pleuro-pulmonaire

III- Physiologie :

Les 03 voies de propagation des cancers secondaires sont :
1- Propagation par contigüité : les cancers de l’œsophage peuvent atteindre la trachée et la bronche souche gauche. Les cancers du sein et les cancers sous-diaphragmatiques peuvent atteindre la plèvre et le poumon par contigüité.
2- Propagation par voie sanguine : de nombreuses tumeurs se drainent dans le filtre capillaire pulmonaire et métastasent d’emblée au niveau pulmonaire.
D’autres se drainent dans le filtre capillaire d’un autre organe par exemple le système porte pour les tumeurs digestives ou ovariennes. Dans ce cas, les cellules néoplasiques embolisent de préférence dans le premier site qui est le foie puis secondairement au niveau pulmonaire.
3- Propagation par voie lymphatique : Elle est parfois la seule voie suivie dans les tumeurs digestives et bien sur les tumeurs bronchiques elles-mêmes.
Le trajet est le plus souvent : lymphatique, canal thoracique, puis voie veineuse.
L’envahissement diffus donne l’aspect particulier de lymphangite carcinomateuse.

IV- Diagnostic positif :

CLINIQUE :

– Dans 25% des cas ces cancers sont de découverte radiologique systématique.
– Le cancer secondaire peut être découvert à l’occasion d’une pleurésie abondante et récidivante ou d’une broncho-pneumopathie persistante et récidivante.

Signes cliniques :

– Signes fonctionnels respiratoires : dyspnée d’effort, toux tenace rauque, douleur thoracique témoignant de l’envahissement pariétal et pleural, rarement hémoptysie.
– Symptômes extra pulmonaires peuvent être en relation avec un cancer primitif : douleurs osseuse costales ou vertébrales, ADP périphérique.
– L’examen clinique : peut être normal, parfois retrouve un syndrome de condensation parenchymateuse un épanchement pleural, ou exceptionnellement un pneumothorax .
Examen somatique complet est indispensable comportant un examen général : aires ganglionnaires, thyroïdes. Sein, prostate, testicule, foie, rate…

Formes radio-cliniques :

1- Forme nodulaire : peut être uniques ou multiple.
Particulièrement le cancer bronchique primitif.
– Nodules multiples : classique aspect en lâcher de ballons, l’évolution de cette forme se fait rapidement vers l’asphyxie terminale.

2- Forme réticulonodulaire : 2 formes :

A- Lymphangite carcinomateuse : les lymphatiques du poumon sont bourrée de cellules néoplasiques, elle réalise une forme réticulaire pure.
Clinique :dyspnée + cyanose + hippocratisme digital.
Le diagnostic se fait par biopsie bronchique et étude histologique.

B- Miliaire carcinomateuse : nodules de 1-3 mm de diamètre, l’extension de fait des bases vers les sommets, il existe 3 stades clinique de cette forme :
1- stade de latence clinique : symptomatique.
2- stade de dyspnée symptomatique.
3- stade d’asphyxie.
A partir du 2eme stade, la dyspnée est généralement majorée par l’existence d’un épanchement pleural abondant.

3- Forme infiltrative : opacité peu dense en plage à limites imprécises et à extension hilifuge.

4- Forme atélectasique :

5- Forme pleurale : pleurésie abondante, douloureuse récidivante ; le liquide pleural est sérohématique ou sérofibrineux, des cellules néoplasiques peuvent être mise en évidence dans ce liquide, la ponction biopsie pleurale réalisé parfois sous pleuroscopie permet de poser le diagnostic.

6- Forme médiastinale : ADP volumineuse de siège médistinal peuvent être à l’origine d’une irritation bronchique avec toux sèches, compression récurentielle ou syndrome cave supérieur.

DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE :

LES MOYENS :

1- L’endoscopie bronchique : il est important de multiplier les biopsies afin de d’obtenir le maximum de prélèvements pour augmenter les chances d’obtenir un diagnostic. On pourra donc :

  • biopsier une muqueuse bourgeonnante ce qui est peu fréquent.
  • biopsier la muqueuse saine surtout s’il existe un aspect « à gros plis » évocateur de lymphangite.
  • faire des biopsies étagées et /ou transbronchiques guidées par un amplificateur de brillance.
  • enfin , les études cytologiques peuvent être très utiles et porteront sur le produit d’aspiration bronchique ou mieux sur le produit d’un lavage alvéolaire réalisé dans le territoire suspect.

2- La ponction transpariétale : la ponction percutanée guidée par le scanner est particulièrement intéressante lorsque la masse est importante et périphérique.

3- La ponction et la biopsie : en cas de pleurésie sont également des examens informatifs.

4- La thoracotomie : elle peut être indiquée si tous les examens précédents sont négatifs et peut régler en un temps le diagnostic et le traitement par exérèse pour certains types de cancers.

STRATÉGIE DIAGNOSTIQUE :

1- Pour la lymphangite carcinomateuse :
– biopsies étagées, voire transbronchiques.
– valeur du LBA avec cytologie.

2- Pour les nodules :
– biopsies sous fibroscopie en première intention..
– cytoponction transthoracique si biopsies négatives à la fibroscopie.

V- Diagnostic différentiel :

il est essentiellement radiologique :
1- devant les formes bronchiques : discuter : un cancer bronchique primitif.
2- devant les formes uniques : discuter le diagnostic des opacités rondes intra parenchymateuse unique (kystes hydatiques, tuberculome,tumeur bénigne).
3- devant les formes multiples : kystes hydatiques multiples, ataphylome, tuberculome multiple.
4- devant les formes miliaires : pneumoconiose (surtout silicose), miliaire tuberculeuse,sarcoïdose, miliaire cardique…
5- devant les formes pleurales : discuter toutes les pleurésies séro-hématiques ou sérofibrineuses.
6- devant les formes médiastinales : ADP médiastinales des hémopathies malignes, tuberculose,sarcoïdose.

VI- Traitement :

Traitement symptomatique : en fonction de la forme clinique de la métastase.

1- Pleurésie :

Liquide : évacuation, corticoïdes, symphyse (pleuroscopie ou chirurgie).
Douleurs : antalgiques (les 3 pliers).

2- Lymphangite néoplasique – miliaire – lâcher de ballons(f. bilatérale) :

Corticoïdes peu efficaces, oxygénothérapie d’efficacité temporaire, anxiolytiques et opiacés.

3- Les sténoses bronchiques :

Chirurgie si possible, geste local parfois (laser / cryothérapie / radiothérapie / prothèse) traitement palliatif (corticoïdes, antibiotiques… ).

4- Opacité unique :

La chirurgie préconisée quand intervalle entre primitif et métastase prolongé, tumeur à corne, marche lente (sarcome, rein, colon…) chirurgie possible même quand lésions multiples. Chirurgies itératives parfois. La chirurgie des métastases devra être économe (wedge résection).

Traitement étiologique en fonction de l’hormonosensibilité ou de la chimiosensibilité présumée de la tumeur primitive

– Sein : tamoxifène ou autre trt hormonal, chimiothérapie
– Prostate : anti androgène-agoniste LH-RH
– Corps thyroïde : iode 131
– Tube digestif : 30 % de répondeurs à la chimiothérapie

Les métastases n’ont pas toujours la même sensibilité que la tumeur primitive ; une chimiothérapie antérieure laisse présager d’une moins bonne activité lors de la rechute ou de métastase.

Traitement chirurgical :

Indication rare surtout dans certains cas de métastases en masse unique et périphérique sans envahissement locorégional et quand la tumeur primitive est traitée chirurgicalement de façon efficace.

VII- Pronostic :

– Dans l’ensemble certaines formes ont une évolution foudroyante et d’autres ont une évolution très limitée (métastase du cancer du colon)
– La survie moyenne après constatation de métastases pulmonaires non traitées est de 9 à 11 mois. Le pronostic est meilleur dans certains cas et peut être amélioré par la chimiothérapie, hormonothérapie ou la chirurgie.

Cours du Dr Kherbi – Faculté de Constantine

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