Dysthyroïdies

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(Last Updated On: 15 août 2018)

Introduction :

  • Incidence élevée dans la population générale et à tout âge
  • Forte prévalence chez la femme (2^4%)
  • L’hormone thyroïdienne contrôle l’activité métabolique de tous les tissus en régulant les gènes dont les produits protéiques sont essentiels pour la respiration cellulaire

I/- Rappels physiologiques :

Glande thyroide : glande endocrine placée devant la trachée; au-dessous du larynx. Elle est constituée de deux lobes reliés entre eux par l’isthme. Le tissu thyroïdien est organisé en follicule

Rôle : synthèse, stockage et sécrétion des hormones thyroïdiennes:
– T3 tri-iodothyronine.
– T4: lévothyroxine.

Synthèse/ stockage et libération des hormones thyroïdiennes :

La synthèse des hormones thyroïdiennes comporte plusieurs étapes :

– Captation de l’iode : l’iode alimentaire est capté activement par la thyroïde
– Oxydation et fixation de l’iode sur les groupes tyrosyl de la thyroglobuline: assurées par une thyropéroxydase (TPO).
– Couplage :
Un résidu de mono-iodotyrosine (MIT) et un résidu de di-iodotyrosine(DIT) se combinent pour former la tri-iodothyronine T3, et deux résidus de di-iodotyrosine pour former la tétrabdothyronine ou thyroxine T4.T3 et T4 sont fixées à la thyroglobuline.
– Stockage : La thyroglobuline qui porte T3, T4, MIT et DIT, est stocké dans le colloïde dans la lumière du follicule thyroïdien.
– Libération : la thyroglobuline passe de la lumière folliculaire à la partie apicale du thyrocyte par endocytose. Les lysosomes contenant des enzymes catalytiques libèrent les hormones thyroïdiennes par protéolyse de la thyroglobuline .les hormones ainsi libérées quittent le thyrocyte au niveau de la membrane basale.

Distribution et Métabolisme :

– Libérées au niveau sanguin; lesT4 et T3 sont fortement liées à la TBG (thyroxine binding globuline)
– On trouve dans les tissus périphériques des enzymes qui convertissent laT4 enT3 par désiodation

– La T3 est métaboliquement plus puissante que la T4
– La fraction libre des hormones thyroïdiennes est métabolisée par le foie et excrétée dans la bile

Rôle des hormones thyroïdiennes :

Les effets des hormones thyroïdiennes sont très complexes et sont surtout connus par les conséquences de leur déficience. Elles agissent à plusieurs niveaux :

  • Croissance staturo-pondérale :

Une déficience avant la naissance donne un défaut d’ossification mais l’enfant naît avec une taille normale. Une déficience après la naissance entraîne un défaut de développement staturo-pondéral.

  • Maturation du système nerveux central :

Le rôle des hormones thyroïdiennes est particulièrement important avant la naissance et dans les 45 premiers jours suivants, car leur déficience est à l’origine du crétinisme (retard mental irréversible). La protéine myélique (important constituant de la myéline) est produite par un gène régulé par les hormones thyroïdiennes durant le développement.

  • Métabolisme basal et thermogenèse :

Les hormones thyroïdiennes augmentent le métabolisme basal et la consommation d’oxygène au niveau du cœur, des muscles squelettiques, du foie, des reins, mais pas au niveau du cerveau, rate et gonades. Le mécanisme de l’action calorigénique des hormones thyroïdienne reste mal connu.

  • Cœur : Elles augmentent le débit et surtout le rythme cardiaques.
  • Muscle strié :

L’hyperthyroïdie entraîne une fonte musculaire et l’hypothyroïdie un ralentissement de la contraction.

  • Tissu adipeux :

Elles augmentent la sensibilité des cellules adipeuses à l’effet lipolytique de diverses hormones, en particulier les catécholamines. Elles stimulent le catabolisme du cholestérol en acides biliaires et l’hypercholestérolémie est un signe caractéristique de l’hypothyroïdie.

Régulation :

– La synthèse est régulée par la thyréostimuline hypophysaire (TSH) elle-même sous contrôle de la thyréolibérine (TRH) hypothalamique
– Les hormones thyroïdiennes exercent un Feed Back sur la sécrétion de TSH et TRH.

Valeurs normale :

TSH : 0.4 à 4 mUI/l

T4 et T3 sériques :

II/- Les hypothyroïdies :

  • L’hypothyroïdie est un déficit de sécrétion des hormones thyroïdiennes = Incapacité de la thyroïde à produire suffisamment d’hormones pour combler les besoins métaboliques.
  • Le déficit est dit primaire en cas d’atteinte de la glande thyroïde (TSH élevée)
  • Le déficit est dit secondaire si carence en TSH liée à une atteinte hypophysaire ou hypothalamique (TSH normale ou basse)

    Hypothyroïdies primaires
Thyroïdite de Hashimoto
Hypothyroïdies secondaires

Signes cliniques :

Asthénie – Prise de poids – Bradycardie – Hypothermie – Sécheresse cutanée Constipation – Myalgie ; Crampes musculaires – Arthralgie – Perte de cheveux

• Non traitée, l’hypothyroïdie a des effets délétères importants sur la santé cardiovasculaire, la fonction neurologique, la reproduction et le développement foetal

Conséquences si non prise en charge de l’hypothyroidie :

—> Cardiovasculaires : Diminution du débit cardiaque

—> Neurologiques Ralentissement des fonctions intellectuelles, troubles psychiatriques, hypoxie cérébrale

—> Fécondité-grossesse

  1. Altération de la fécondité
  2. Augmentation du risque d’avortement spontané et d’accouchement prématuré
  3. Altération du développement du nouveau-né

—> Coma myxœdémateux : Hypotension grave + insuffisance pluri-organique

Diagnostic des hypo-thyroïdies :

  • Dosage de la TSH = mesure sensible de la fonction thyroïdienne
  • TauxdeT3etT4
  • Mesure du taux d’anticorps antithyroïdiens

    Hypothyroïdie clinique / Hypothyroïdie sublinique

III/- Les hyperthyroïdies :

Hyperfonctionnement de la glande thyroïde avec augmentation de la sécrétion des hormones thyroïdiennes -> Thyrotoxicose

Différentes formes et leurs étiologies :

Pathologie Physiopathologie Critères cliniques
Maladie de Basedow Auto-immune

Anticorps anti récepteurs TSH

Thyrotoxicose Ophtalmopathie Goitre diffuse homogène
Adénome toxique Tumeur bénigne sécrétante thyrotoxicose Nodule isolé
Goitre multi- nodulaire toxique Tumeurs bénignes sécrétantes Thyrotoxicose Gros goitre hétérogène Nodules multiples
Surcharge iodée Iatrogène (Amiodarone, produits de contrastes iodés, antiseptiques

iodés…)

Thyrotoxicose Goitre variable
Maladie de Graves

Forme typique de la thyrotoxicose :

Signes généraux: Perte de poids, Température cutanée élevée avec Hypersudation et polydipsie Signes cardiovasculaires: Palpitations de repos et tachycardie (effets chronotrope et inotrope positifs)

Signes neuromusculaires: Fatigue intense essentiellement musculaire, Tremblements, Nervosité, agitation, troubles du sommeil

Les complications sont souvent cardiaques (troubles du rythme et insuffisance cardiaque) avec altération de l’état général (asthénie et amaigrissement important)

Diagnostic positif :
Dosage de la TSH et la T4 libre

Hyperthyroïdie clinique / Hyperthyroïdie sublinique

IV/- Traitement des dysthyroïdies :

A/ Traitement des hypothyroïdies :

  • La lévothyroxine (L-T4) est le traitement substitutif de choix de Y hypothyroïdie. Elle est indiquée pour les hypothyroïdies primaires ou secondaires et dans toutes les situations où Ton désire freiner la TSH.
  • La liothyronine (L-T3) est également commercialisée; action plus rapide; demi-vie faible; utilisée généralement dans le cas des urgences

Stratégie et optimisation thérapeutique :

Les doses sont adaptées à la réponse du patient (maîtrise des symptômes) et aux résultats des dosages de la TSH
Toutes les 6 à 8 semaines s’impose une évaluation clinique et biochimique
+ Les doses sont accrues par paliers de 12,5 à normalisation du taux de TSH et résorption des signes et des symptômes
Taux de la TSH cible 0,45-4,12mUI/L
+ 1 prise quotidienne, le matin à jeun (temps de demi-vie long)
+ À distance de toute alimentation (au moins 20 à 30 minutes avant le petit-déjeuner).

Interaction médicamenteuses
Populations particulières

B/ Traitement des hyperthyroïdies :

Base du traitement :

  • Pour diminuer l’activité de l’hormone thyroïdienne, on utilise les ANTITHYROl’DIENS
  • Les traitements ont pour but de limiter la quantité d’hormones thyroïdien nés que la glande peut produire
  • La thérapeutique vise:

A diminuer directement la synthèse Bloquer les transports ioniques

L’exploitation des mécanismes physiologiques de régulation Destruction partielle de la thyroïde

a- Inhibiteur de la capture d’iode :

  • Certains anions entrent en compétition avec l’iode pour son transporteur

+ Perchlorate
+ Thiocyanate
+ Pertechnetate

  • Réduisent l’iode disponible pour la synthèse d’hormones
  • Leurutilisation est limitée : risque d’aplasie

b- Inhibiteur de l’incorporation : iodures

• L’iode radioactif 131l¯; Emission de radiations β toxiques pour la cellule

+ Capturé sans distinction avec 127l¯ par le symporteur Na+/I-
+ Aboutit à la destruction locale et spécifique de la cellule c.

c- Inhibiteurs de l’incorporation : Représentés par :

  • Dérivés mercapto-imidazole : Thiamazole Carbimazole
  • Dérivés thiouracile: Benzylthiouracile Propylthiouracile

Mécanisme d’action :
Inhibition de la formation d’hormones thyroïdiennes par :
– Interférence avec l’incorporation d’iode sur les résidus tyrosyl de la thyroglobuline
– Inhibition de l’assemblage des iodotyrosyl en thyronines
– Inhibition de la peroxydase
L’effet clinique met longtemps (des semaines) à apparaître

Indications : Toutes formes d’hyperthyroïdie

Effets indésirables :
– Neutropénie / agranulocytose, dangereux, réversibles.
– Rush cutanés
– Ictère (lésion hépatique)
– Douleurs articulaires

Stratégies thérapeutiques :

Prise en charge des symptômes (traitement symptomatique transitoire)
Stratégie thérapeutique : Maladie de Basedow
Stratégie thérapeutique : traitement radical

Remarque :
– L’Amiodarone est un agent anti arythmique qui contient plus de 35% d’iode dans sa structure. Il a la particularité d’induire différents effets sur la fonction thyroïdienne dont la diminution de la conversion de T4 en T3 et la survenue d’hypothyroïdie. Elle peut également être responsable de deux types d’hyperthyroïdie qui peuvent prendre la forme soit d’une hyperthyroïdie par charge iodé ou d’une thyroïdite non douloureuse.
– On utilise des bêtabloquants non cardiosélectifs pour le traitement symptomatique des hyperthyroïdies parce qu’on a constaté au cours des hyperthyroïdies une surexpression des récepteurs bêta.

Cours du Dr BRIK-BOUGHELLOUT – Faculté de Constantine

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