Signes – Diagnostic et datation de la Mort

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(Last Updated On: 23 septembre 2018)

I- Introduction et Définition de la Mort :

A- La thanatologie :

C’est la science qui étudie la mort sous tous ses aspects, et plus particulièrement du point de vue médico-légal. Elle décrit la mort et recherche à connaître ses mécanismes et ses causes.

B- La mort :

C’est une étape obligatoire que doit subir tout être vivant, caractérisée par l’arrêt complet et définitif des fonctions vitales , avec disparitions de sa cohérence fonctionnelle et notamment de l’activité électrique de cerveau ( tracé E.E.G plats ) , et destructions progressive de ses unités tissulaires et cellulaires jusqu’à sa transformation en poussière .

II- La physiopathologie :

  • parmi les mécanismes qui peuvent entrainer le décès, il y a :
  • cause cardiaque => défaillance circulatoire => chute du débit => anoxie.
  • Cause respiratoire => mécanique ou autre => asphyxie => anoxie.
  • Cause neurologique => troubles de régulation d’origine centrale => anoxie, etc….
  • L’arrêt cardio-circulatoire entraine l’ischémie (défaut d’apport sanguin) qui provoque une anoxie cellulaire (défaut d’apport d’oxygène..).
  • Les conséquences cellulaires :

– lyse du noyau.
– vacuolisation cytoplasmique.

  • Les conséquences biochimiques :

– libération enzymatique.
– consommation rapide de l’oxygène restant.
– stimulation du métabolisme anaérobique et épuisement énergétique.
– accumulation d’ions acides.

  • A terme, on aboutit à une dette irréversible en oxygène, à une acidose et une diminution du stock ATP entrainant une décharge cathécholaminergique aboutissant à une majoration du collapsus.
  • En fonction de type de cellule, le temps maxima d’anoxie autorisant une récupération est le suivant :

– fonctions intellectuelles : 4 à 7’
– centres cérébraux et médullaires : 8 à 10’
– centres vasomoteurs et cardiaques : 20 à 30’
– centres respiratoires : 30 à 50’

La capacité de tolérance est plus importante chez l’enfant.

III- Diagnostic de la mort :

Ce diagnostic repose sur deux catégories de signes , à savoir :

1- les signes négatifs de la vie :

Il s’agit d’un diagnostic précoce de la mort qui repose sur un examen externe du corps et des examens de laboratoire.

a- l’examen externe :

Cet examen montre un arrêt des grandes fonctions vitales :

  • cardio-circulatoire
  • respiratoire

Ces arrêts seront confirmés par l’auscultation de ces deux appareils et par la palpation des trajets artériels .

  • abolition de toute conscience, toute sensibilité, aréflexie
  • perte du tonus musculaire et mydriase bilatérale

Cette abolition et ses pertes sont confirmées par un examen neurologique et

b- les examens de laboratoires :

  • l’angiographie cérébrale ou le scanner cérébral ;
  • les tracés ECG et EEG sont remplacés par une ligne isoélectrique
  • Il est également possible de constater l’absence de flux respiratoire en plaçant un miroir devant la bouche (présence ou absence de buée).
  • la cardiopincture au 4eme espace intercostal gauche : aiguille dans le cœur ne bouge pas => pas de mouvement cardiaque
  • l’artériotomie au niveau de l’artère radiale (plus de flux sanguin)
  • test d’ICARD : test à la fluorescéine (non coloration des conjonctives l/2heure après l’injection de fluorescéine en intraveineux)
  • le test à l’éther (injection sous cutanée d’éther qui ressort par le trou de l’aiguille si le sujet est mort).

2- les signes positifs de la mort :

Appelés aussi les signes tardifs de la mort ou les phénomènes cadavériques.

Ces phénomènes cadavériques se distinguent en :

a- phénomènes physiques :

Le refroidissement cadavérique :

Il résulte de la chute de la T° centrale du corps en rapport avec plusieurs facteurs, entre autre, la T° ambiante, l’état de santé de l’intéressé avant sa mort.

Les lividités cadavériques :

Elles correspondent à des transsudations de sang à travers les vaisseaux selon des phénomènes passifs entrainés par la pesanteur.

Elles deviennent perceptibles ( à partir de la 5ieme heures après le décès et deviennent immuable à partir de la I8ieme heures après la décès) au niveau des régions déclives du corps. Elles sont absentes aux points de pression appliquées sur le corps .

Leur coloration, peuvent nous orienter vers la cause du décès.

A titre d’exemple :

– la coloration rouge carminée : =>intoxication au CO

=>intoxication à l’acide cyanhydrique -la coloration rouge sombre : asphyxie

La déshydratation cadavérique :

Elle résulte de la perte d’eau du corps est responsable :

  • de l’opacification de la cornée (voile glaireux de la cornée)
  • tache noire sclérotique au niveau de l’angle externe de l’œil.
  • affaissement des globes oculaires.
  • par cheminement de la peau.
  • hypotonie des fontanelles chez le nouveau-né.

b- phénomènes chimiques :

La rigidité cadavérique :

Elle est le résultat de l’accrochage des molécules d’actines avec les molécules myosines (en rapport avec l’absence ATP intracellulaire).

Elle affecte l’ensemble des muscles de l’organisme et commence .

Elle débute environ 05 heures après la mort, elle atteint son maximum vers 18 heures.

Si elle est rompue avant la 18 eme heure, elle peut se reconstituer.

c- phénomène actif :

La putréfaction :

La putréfaction est la décomposition des tissus organiques sous l’influence prédominante des bactéries hébergés par l’individu, surtout celles de la flore intestinale, ensuite des mycètes qui envahissent le cadavre.

Elle débute par l’apparition de la tache verte abdominale de putréfaction au niveau de la fosse iliaque droite, 48 heures après la mort parfois un peu plus en hivers, elle résulte de la transformation sous l’action des bactéries, de l’hémoglobine (rouge) en sulfhémoglobine (vert).

La putréfaction complique énormément la tache du médecin légiste, par :

  • l’altération des caractères d’identification,
  • la transformation des lésions traumatiques,
  • fait apparaitre les fausses ecchymoses,
  • la fabrication d’alcaloïdes cadavériques : cause d’erreur toxico

IV- Datation de la mort :

Il n’existe pas de méthodes qui permettent de dater le moment de la mort. Par contre, il existe de multitudes de méthodes actuellement utilisées qui permettent d’estimer ce moment de la mort.

Ce moment ne peut être calculé qu’après avoir calculé le délai post-mortem ( D.P.M) qu’on le soustrait de l’heure du prélèvement du paramètre utilisé à cette effet , exemples :

  • D.P.M = 06h calculé à partir d’une des méthodes thermométriques utilisées
  • l’heure de prélèvement des T° corporel et ambiante qu’ellel serait à 16 h Le moment de la mort serait donc = 16h- 06h = lOh (le moment du décès)
  • D.P.M = 15h calculé à partir des méthodes qui utilisent le taux du potatium dans l’humeur vitrée
  • l’heure de prélèvement de l’humeur vitrée d’un cadavre qu’elle serait 14 h de l’après midi

Le moment de la mort serait donc = 15h – 14h = 01 h du matin

calculé en heure qui sépare le moment de la découverte du corps et celui du moment du décès

La datation de la mort peut se faire à partir :

  • des phénomènes cadavériques.
  • des mesures de température (nomogramme de HENSGE)
  • dosage de potassium dans l’humeur vitré.
  • les réseaux des neurones artificielles -entomologie

Aucune certitude ne peut être tirée de ces méthodes .une simple évaluation peut être avancée avec beaucoup de prudence.

DIAGNOSTIQUE DE LA MORT CEREBRAL (COMA DEPASSE) :

Le concept de mort cérébrale est apparu depuis l’apparition de technique de réanimation, permettant le maintient des fonctions cardiaque, respiratoire et rénale chez un sujet dont les fonctions vitales sont totalement et définitivement abolies.

  • La mort du cerveau résulte de lésions cérébrales diverses, soit primitives (traumatisme, encéphalite, accident hémorragique) soit secondaire (anoxie d’origine circulatoire ou respiratoire, intoxication).
  • Les critères médicolégaux du coma dépassé sont :
  • Perte totale de la conscience et de toute activité spontanés.
  • Abolition de toute réactivité dans le domaine des nerfs crâniens :

– abolition du réflexe coméen
– mydriase aréflexique
– disparition de la déglutition
– pas de clignement à la menace, pas de réactions aux bruits ni aux stimuli nociceptives dans le territoire du trijumeau.

  • Abolition de la respiration spontanée.
  • Tracé éléctro-encéphalographique nul :

Chaque enregistrement doit durer au moins 10 minutes à amplitude normale, double, puis maximale.

2 tracés EEG nuis à 6 heures d’intervalle apportent une certitude graphique de mort cérébrale et de plus un document médico-légal irrécusable.

  • Autres signes cliniques : température centrale entre 32°-34°c, rythme cardiaque sinusal 40 à 60 battements/mn.
  • Autres examens complémentaires : angiographie cérébral, potentiels évoqués auditifs précoces.

V- Formes médico-légales de la mort :

A- LA MORT NATURELLE :

Souvent, elle est l’issue fatale d’une maladie, la personne décédée était suivie et son décès n’étonne pas en outre mesure.

B- LA MORT VIOLENTE :

Accidentelle : mort en rapport avec un traumatisme accidentel. Le lien de causalité est évident .si les circonstances de l’accident ne sont pas suspectes, il n’y a pas lieu de cocher < obstacle médico-légale>.

Suicidaire : le caractère suicidaire ne peut être établi qu’après enquête et examen soigneux du corps du défunt. L’enquête devra s’intéresser aux antécédents psychiatriques et aux traitements.

Le diagnostic différentiel avec un acte criminelle devra toujours être analysé, au moindre doute, il faut cocher la case : obstacle.

Criminelle : si l’action criminelle est évidente. Exemple : plaie par arme à feu sans arme à proximité.

C- LA MORT SUSPECTE :

  • liée à la personnalité du défunt (membre de la mafia, homme politique, etc….)
  • présence de lésions ne permettant pas d’expliquer l’étiologie du décès.
  • enquête ne prouvant pas le caractère dépressif du défunt.
  • Mort d’une personne jeune, sans cause évidente telle que la mort subite d’un sportif par exemple.

VI- Le Constat de décès et le Certificat médical de décès :

Le constat de décès est une obligation du médecin vis à vis de celui qui vient de mourir, de sa famille et la société.

Au plan social, la mort intéresse le ministère publi qui est toujours informé de toutes les morts qui ne sont pas naturelles.

Elle intéresse également l’état civil qui tient dans chaque mairie la liste des citoyens.

La rédaction du certificat de décès relève de la compétence de tout médecin.

Le certificat de constat de décès est rédigé sur papier, en respectant les règles générales de rédaction de ce document.IL comporte deux parties :

La 1ère partie dite nominative, est destinée au bureau de l’état civil; elle comporte l’identité du défunt (nom, prénom, âge, sexe, ainsi que l’heure, la data et le lieu du décès), le médecin y certifie que la mort est réelle, constante et de cause naturelle ou de cause non naturelle (mort violente ou suspecte).

La 2ème partie constitue le certificat médical de la cause de la mort proprement dite, cette partie est anonyme, il est demandé au médecin de préciser la cause directe du décès (état pathologique, homicide, suicide ou accident).cette partie est destinée au ministère de la santé publique. Elle permettra aux épidémiologistes de faire des statistiques sur les causes du décès.

En cas de mort naturelle, l’officier de l’état civil gardera la partie nominative, et adressera la partie anonyme au ministère de la santé publique, afin de délivrer le permis d’inhumation par absence d’obstacle médico-légal.

En cas de mort non naturelle, l’officier de l’état civil préviendra les autorités compétentes pour ouvrir une enquête et l’inhumation ne sera autorisée qu’après la fin des investigations médico-légales.

VII – La législation :

Art 49 du code d’état civil :

La déclaration du décès doit être présentée dans les 24 heures suivant la mort.

Art 78 du code d’état civil :

Aucune inhumation ne peut être faite sans autorisation sur papier d’officier de l’état civil.

L’acte de décès sera dressé par l’officier de l’état civil dans la commune ou le décès a eu lieu d’après la déclaration d’un parent du défunt ou celle d’une personne disposant des renseignements exacts sur son état civil.

Art 82 du code d’état civil :

En cas de mort suspecte ou violente, l’inhumation ne peut se faire que lorsqu’un officier de police assisté d’un docteur en médecine aura dressé un procès verbal sur l’état du cadavre ainsi que les circonstances relatives du décès.

Cours du Pr B. Bensmail – Faculté de Constantine

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